𝐄𝐜𝐡𝐨 𝐝𝐮 𝐁𝐢𝐧𝐨𝐬 : B𝐢𝐥𝐚𝐧 𝐝𝐞́𝐠𝐮𝐢𝐬𝐞́

Le mandat embelli : quand le passé se repeint aux couleurs du présent À l’approche des élections, chaque équipe sortante cherche à valoriser son bilan.

C’est de bonne guerre, à condition que cela se fasse dans le respect de la vérité et de la mémoire collective. Mais à Seysses, le journal communal « L’Écho du Binos », diffusé tout récemment, franchit un pas de plus : il transforme l’histoire municipale en un outil de communication électorale, en s’appropriant sans gêne le travail, les projets et les réalisations initiés bien avant le mandat actuel.

Page après page, on y découvre un bilan triomphal, une succession d’actions valorisées, d’aménagements présentés comme autant de réussites de l’équipe en place. Pourtant, lorsqu’on regarde de près, une évidence saute aux yeux : près de 90 % de ce qui est mis en avant existait déjà, parfois depuis 19 ou 20 ans. Des projets anciens, inscrits dans la continuité de plusieurs mandats, voire réalisés sous l’impulsion de maires précédents, sont désormais revendiqués comme des créations récentes.

Un collège, alors même que cette compétence appartient au Département, devient soudain une « fierté municipale ». Un gymnase, qui accompagne automatiquement la construction d’un collège, est présenté comme une initiative locale. Une école élémentaire, déjà programmée par l’équipe antérieure, est réinaugurée comme une idée nouvelle. Et la rénovation du centre-ville, pourtant dans les tuyaux depuis deux décennies, est repeinte aux couleurs du mandat sortant.

Cette appropriation systématique du travail passé n’est pas anodine : elle construit un récit politique biaisé, où l’histoire municipale se réécrit au profit d’une image personnelle. Elle déforme la mémoire collective, gomme la contribution des élus et techniciens d’hier, et donne aux citoyens l’impression d’une réussite continue — alors qu’il s’agit souvent de dossiers hérités, relancés ou simplement finalisés.

Dans ce contexte, « L’Écho du Binos » cesse d’être un journal communal neutre et informatif. Il devient un outil de valorisation politique, un miroir flatteur tourné vers la majorité sortante. Or un journal municipal appartient à tous les habitants. Il doit informer, pas glorifier. Il doit rendre compte, pas réécrire. Quand l’information publique se confond avec la communication de campagne, c’est la transparence démocratique qui en souffre.

Et pendant que l’on consacre tant d’énergie à se féliciter du passé, les vrais chantiers attendus par les citoyens. Ils ne se réveillent que dans la dernière ligne droite du mandat, à la hâte, comme pour cocher quelques cases avant les élections.

Ce n’est pas cela, la gestion publique. Une commune se construit dans la continuité, la reconnaissance du travail collectif, et le respect des faits. Un mandat solide n’a pas besoin de s’embellir : il se justifie par la cohérence de ses choix et la fidélité à la parole donnée.

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